Cahier Critique de Poésie - n°19 - W. H. Auden : La Mer et le Miroir

 Cahier Critique de Poésie - n°19 - W. H. Auden : La Mer et le Miroir
01 mars 2010

W. H. Auden : La Mer et le Miroir

Ceux qui ont été au bout de La Tempête savent que Prospero se résout au public, se suspend au drame, se déduit du théâtre. Peut suivre une poésie, au lieu de revenir sur l'intrigue, qui collectionne les saillies plus systématiquement qu'harmoniquement. Dans La Mer et le Miroir des années 1942-1944, ici traduit par Bruno Bayen et Pierre Pachet, Wystan Hugh Auden fait suite à Shakespeare en trois chapitres : « Prospero à Ariel », « Les seconds rôles », « Caliban au public ». Chaque fois, l'ampleur du propos est recadrée retapée décalquée fonction des référentiels psychologiques en place et tels que le genre plus ou moins de circonstance les dispose (à peine, mais qui plus est). Il pourrait y avoir une langue qui fait en sorte de maintenir une impressionnante densité de tressaillements existentiels, à faire pâlir Souriau. Mais comme la densité est effectivement impressionnante, on ne peut pas dire que la langue fait en sorte plus qu'à y voir, mais plutôt des proses de telles teneurs qu'il s'y met encore plus d'enjeux qu'elles n'en peuvent contenir. Un allant même dans la complexité qui donnerait envie de modéliser pour vérifier comment l'étendue des motifs n'est quand même pas inversement tout à fait proportionnelle à la segmentation énonciative. Toujours est-il : on s'y croit lever une formulation heureuse et fait-on autant repérer comme des adjuvants rustines, dire qu'on n'arrêterait pas de s'y prendre le pouls.

                                                                                                              David Christoffel