D.H. Lawrence : l'éternel anticonformiste
Avec le cinquième et ultime volume des nouvelles complètes de l’auteur de L’Amant de Lady Chatterley, les éditions Le Bruit du temps achèvent un beau projet. La publication dans l’ordre chronologique, avec une traduction renouvelée due à Marc Amfreville, de l’ensemble des « short stories » de l’écrivain en suivant scrupuleusement la monumentale « Cambridge Edition », référence absolue sur le sujet avec son appareil critique et ses éclairantes notices. Au fil des six nouvelles de ce dernier tome, on retrouve bien sûr l’esprit rebelle de l’auteur décédé de la tuberculose en 1930, à l’âge de quarante-quatre ans.
Ainsi dans le texte inaugural du recueil, La Vierge et le gitan, se déploie une sublime variation sur un thème cher à l’écrivain : la puissance des amours non conventionnelles. En l’occurrence celles qui embrasent le coeur d’une jeune femme et d’un gitan, contre-modèle à l’atmosphère asphyxiante où végétait l’héroïne, confinée dans un presbytère avec sa grand-mère et une tante « Old style ». Ailleurs, comme dans Le Coq échappé, D. H. Lawrence met en scène une histoire de résurrection, réminiscence de ses séjours en Italie. Sorte de testament spirituel de l’auteur, l’histoire montre un Christ paradoxal, déprimé, fuyant les foules, s’isolant, découvrant que « le monde réel est mille fois plus merveilleux qu’aucun ciel ou salut ». Dans la mythologie du sensualiste écrivain anglais, la vraie résurrection devait s’accomplir dans le mystère de l’amour charnel et la révélation de l’autre soi-même rêvé.
Alain Favarger